PARIS: agir local pour penser global : Différence entre versions

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(Mille mairesTexte italique)
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Avant cela, sur toute la planète, les métropoles sont surtout devenues le lieu de la croissance. Dans leur espace se développent les start-up, la recherche, l’innovation et l’économie à haute valeur ajoutée propre à la mondialisation. Ce sont les grandes villes cosmopolites, ouvertes, ces «villes-monde», qui tirent les PIB nationaux vers le haut. Mais ce sont elles aussi qui, par leurs résultats, creusent mécaniquement les inégalités territoriales.
 
Avant cela, sur toute la planète, les métropoles sont surtout devenues le lieu de la croissance. Dans leur espace se développent les start-up, la recherche, l’innovation et l’économie à haute valeur ajoutée propre à la mondialisation. Ce sont les grandes villes cosmopolites, ouvertes, ces «villes-monde», qui tirent les PIB nationaux vers le haut. Mais ce sont elles aussi qui, par leurs résultats, creusent mécaniquement les inégalités territoriales.
  
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'''Mille maires'''
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Les villes comptent, et c’est la question climatique qui leur donne du poids. Le 22 juin, l’Union européenne et l’envoyé spécial des Nations unies pour le climat, Michael Bloomberg, ont créé la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie, soit plus de 71 000 villes dans 119 pays. Ancien maire de New York, conseiller climat de Ban Ki-moon, le milliardaire avait poussé Anne Hidalgo à monter un «sommet des 1 000 maires» en parallèle à la COP 21. «Il aurait été impossible d’avoir l’accord COP 21 sans celui qu’ont signé les maires des grandes villes», estime Mark Watts, directeur général du mouvement «C40 Cities». Bloomberg est maintenant à la tête de la Convention mondiale des maires.
 
Les villes comptent, et c’est la question climatique qui leur donne du poids. Le 22 juin, l’Union européenne et l’envoyé spécial des Nations unies pour le climat, Michael Bloomberg, ont créé la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie, soit plus de 71 000 villes dans 119 pays. Ancien maire de New York, conseiller climat de Ban Ki-moon, le milliardaire avait poussé Anne Hidalgo à monter un «sommet des 1 000 maires» en parallèle à la COP 21. «Il aurait été impossible d’avoir l’accord COP 21 sans celui qu’ont signé les maires des grandes villes», estime Mark Watts, directeur général du mouvement «C40 Cities». Bloomberg est maintenant à la tête de la Convention mondiale des maires.
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Moteurs de croissance, lieu «de la pollution mais aussi des solutions», comme dit Anne Hidalgo, les grandes villes peuvent-elles devenir une sorte de contre-pouvoir face aux Etats ? Les maires de Madrid et de Barcelone ont voulu aller plus loin que l’Etat dans l’accueil des réfugiés. Et la maire de Paris a pris de court les pouvoirs publics en annonçant fin mai la création d’un camp. Le gouvernement la soutient désormais, mais Paris lui a forcé la main.
 
Moteurs de croissance, lieu «de la pollution mais aussi des solutions», comme dit Anne Hidalgo, les grandes villes peuvent-elles devenir une sorte de contre-pouvoir face aux Etats ? Les maires de Madrid et de Barcelone ont voulu aller plus loin que l’Etat dans l’accueil des réfugiés. Et la maire de Paris a pris de court les pouvoirs publics en annonçant fin mai la création d’un camp. Le gouvernement la soutient désormais, mais Paris lui a forcé la main.
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Toutefois, quelle que soit sa puissance, une métropole a besoin d’aide dans certains combats. Face aux plateformes telles qu’Airbnb, les villes peuvent réguler au niveau municipal, comme l’a fait Paris. Mais la capitale a aussi demandé à l’Etat des modifications législatives pour appuyer sa réglementation (dans la loi pour une République numérique).  
 
Toutefois, quelle que soit sa puissance, une métropole a besoin d’aide dans certains combats. Face aux plateformes telles qu’Airbnb, les villes peuvent réguler au niveau municipal, comme l’a fait Paris. Mais la capitale a aussi demandé à l’Etat des modifications législatives pour appuyer sa réglementation (dans la loi pour une République numérique).  
  
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De fait, les villes collaborent de plus en plus entre elles sans se soucier des frontières. Paris a lancé récemment, avec d’autres métropoles, une très grosse commande publique pour négocier au mieux l’acquisition de matériel électrique de nettoyage. Vu la taille de la commande, «cela valait le coup pour ces industriels d’investir en recherche et développement afin de mettre au point ces nouveaux camions bennes, explique Pauline Veron, adjointe au maire de Paris. On n’aurait jamais pu parvenir à un tel résultat seuls».
 
De fait, les villes collaborent de plus en plus entre elles sans se soucier des frontières. Paris a lancé récemment, avec d’autres métropoles, une très grosse commande publique pour négocier au mieux l’acquisition de matériel électrique de nettoyage. Vu la taille de la commande, «cela valait le coup pour ces industriels d’investir en recherche et développement afin de mettre au point ces nouveaux camions bennes, explique Pauline Veron, adjointe au maire de Paris. On n’aurait jamais pu parvenir à un tel résultat seuls».
«Hors-sol»
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C’est le bon côté des choses. Mais dans les réseaux relationnels que les métropoles tissent entre elles, n’y a-t-il pas un risque d’apparaître «hors-sol», détachées de leur territoire ? Paris a-t-il une responsabilité vis-à-vis de Creil et Londres vis-à-vis de Luton ? «Les villes-monde vont devoir s’intéresser à ce qui se passe dans les espaces entre les grandes métropoles qui risquent de devenir des déserts économiques», expliquait récemment un grand patron du BTP.  
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'''«Hors-sol» C’est le bon côté des choses.'''
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Mais dans les réseaux relationnels que les métropoles tissent entre elles, n’y a-t-il pas un risque d’apparaître «hors-sol», détachées de leur territoire ? Paris a-t-il une responsabilité vis-à-vis de Creil et Londres vis-à-vis de Luton ? «Les villes-monde vont devoir s’intéresser à ce qui se passe dans les espaces entre les grandes métropoles qui risquent de devenir des déserts économiques», expliquait récemment un grand patron du BTP.  
 
Pour le géographe Laurent Chalard, «si ce développement des villes-monde doit se faire au détriment d’un hinterland [base arrière, ndlr] sous-productif, qui le perçoit comme une menace, […] alors on peut craindre une montée des extrémismes et du ressentiment envers ces grandes villes». Pour lui, on n’en est pas là : «L’Etat-nation a toujours eu le dernier mot.»
 
Pour le géographe Laurent Chalard, «si ce développement des villes-monde doit se faire au détriment d’un hinterland [base arrière, ndlr] sous-productif, qui le perçoit comme une menace, […] alors on peut craindre une montée des extrémismes et du ressentiment envers ces grandes villes». Pour lui, on n’en est pas là : «L’Etat-nation a toujours eu le dernier mot.»
  
Christophe Alix et Sibylle Vincendon — 24 juillet 2016
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'''Christophe Alix et Sibylle Vincendon — 24 juillet 2016'''
  
 
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Version du 15 février 2018 à 22:58

Face à la mollesse des Etats sur les enjeux de la mondialisation, les maires des métropoles montent au créneau avec des solutions éprouvées à leur échelle.

C’est une prise de pouvoir discrète mais peu aimable. Dans une tribune commune, publiée trois jours après le vote sur le Brexit, Sadiq Khan, maire de Londres, et Anne Hidalgo, maire de Paris, ont dénoncé la «léthargie des Etats-nations». Le XXIe siècle, affirment-ils, sera «celui des villes-monde». Londres, qui a voté à 59,9 % pour le remain, et Paris, où le Front national patine à 6 % (régionales 2015), entendent bien être les fers de lance de la résistance au repli. Avant cela, sur toute la planète, les métropoles sont surtout devenues le lieu de la croissance. Dans leur espace se développent les start-up, la recherche, l’innovation et l’économie à haute valeur ajoutée propre à la mondialisation. Ce sont les grandes villes cosmopolites, ouvertes, ces «villes-monde», qui tirent les PIB nationaux vers le haut. Mais ce sont elles aussi qui, par leurs résultats, creusent mécaniquement les inégalités territoriales.

Mille maires



Les villes comptent, et c’est la question climatique qui leur donne du poids. Le 22 juin, l’Union européenne et l’envoyé spécial des Nations unies pour le climat, Michael Bloomberg, ont créé la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie, soit plus de 71 000 villes dans 119 pays. Ancien maire de New York, conseiller climat de Ban Ki-moon, le milliardaire avait poussé Anne Hidalgo à monter un «sommet des 1 000 maires» en parallèle à la COP 21. «Il aurait été impossible d’avoir l’accord COP 21 sans celui qu’ont signé les maires des grandes villes», estime Mark Watts, directeur général du mouvement «C40 Cities». Bloomberg est maintenant à la tête de la Convention mondiale des maires.

Moteurs de croissance, lieu «de la pollution mais aussi des solutions», comme dit Anne Hidalgo, les grandes villes peuvent-elles devenir une sorte de contre-pouvoir face aux Etats ? Les maires de Madrid et de Barcelone ont voulu aller plus loin que l’Etat dans l’accueil des réfugiés. Et la maire de Paris a pris de court les pouvoirs publics en annonçant fin mai la création d’un camp. Le gouvernement la soutient désormais, mais Paris lui a forcé la main.

Toutefois, quelle que soit sa puissance, une métropole a besoin d’aide dans certains combats. Face aux plateformes telles qu’Airbnb, les villes peuvent réguler au niveau municipal, comme l’a fait Paris. Mais la capitale a aussi demandé à l’Etat des modifications législatives pour appuyer sa réglementation (dans la loi pour une République numérique).

Quand les grandes villes touristiques - New York, San Francisco, Berlin ou Paris -vont toutes dans le sens de la régulation, la vie des plateformes devient moins simple.

De fait, les villes collaborent de plus en plus entre elles sans se soucier des frontières. Paris a lancé récemment, avec d’autres métropoles, une très grosse commande publique pour négocier au mieux l’acquisition de matériel électrique de nettoyage. Vu la taille de la commande, «cela valait le coup pour ces industriels d’investir en recherche et développement afin de mettre au point ces nouveaux camions bennes, explique Pauline Veron, adjointe au maire de Paris. On n’aurait jamais pu parvenir à un tel résultat seuls».

«Hors-sol» C’est le bon côté des choses.



Mais dans les réseaux relationnels que les métropoles tissent entre elles, n’y a-t-il pas un risque d’apparaître «hors-sol», détachées de leur territoire ? Paris a-t-il une responsabilité vis-à-vis de Creil et Londres vis-à-vis de Luton ? «Les villes-monde vont devoir s’intéresser à ce qui se passe dans les espaces entre les grandes métropoles qui risquent de devenir des déserts économiques», expliquait récemment un grand patron du BTP. Pour le géographe Laurent Chalard, «si ce développement des villes-monde doit se faire au détriment d’un hinterland [base arrière, ndlr] sous-productif, qui le perçoit comme une menace, […] alors on peut craindre une montée des extrémismes et du ressentiment envers ces grandes villes». Pour lui, on n’en est pas là : «L’Etat-nation a toujours eu le dernier mot.»

Christophe Alix et Sibylle Vincendon — 24 juillet 2016